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Chapter 1Traités

Les traités no 1 à 11, généralement désignés sous le nom de traités numérotés, ont été conclus entre 1871 et 1921 entre les Premières Nations et la Couronne britannique.

Section

Les traités et leur importance

La Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 définit un traité comme suit : « un accord international conclu par écrit entre États et régi par le droit international, qu’il soit consigné dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa dénomination particulière ».

Les politiques du Canada rendaient illégales la pratique de la culture et des cérémonies des Premières Nations au début du 20e siècle. Aujourd’hui,Expand
Les politiques du Canada rendaient illégales la pratique de la culture et des cérémonies des Premières Nations au début du 20e siècle. Aujourd’hui, individus et collectivités s'investissent activement à faire renaître leurs pratiques traditionnelles.

 

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1.1

La Cour Suprême du Canada a noté ce qui suit dans son jugement R. c. Sioui en 1990 : « … ce qui caractérise un traité c’est l’intention de créer des obligations, la présence d’obligations mutuellement exécutoires et d’un certain élément de solennité ». L’article 35 de la Constitution du Canada reconnaît et affirme les droits issus de traités, toutefois, comme nous l’indiquerons plus loin, la Couronne et les Premières Nations sont souvent en désaccord en ce qui concerne l’interprétation des traités.

Les Premières Nations ont conçu des méthodes uniques et très créatives de consigner des événements importants comme des traités. Une de ces méthodes est la transmission orale de l’information de génération à génération par l’entremise des récits des aînés et d’autres membres des collectivités. Une autre méthode de consigner des événements importants consistait à fabriquer des ceintures wampums, utilisées par la nation iroquoise Haudenosaunee, afin de créer une représentation visuelle d’une entente. Les ceintures wampums commémoraient des événements et des ententes avec d’autres nations, racontaient des histoires et décrivaient des coutumes, des chroniques ou des lois. Ils ne constituent pas une forme d’écriture. Plutôt, les ceintures wampums sont des symboles visuels, des outils mnémoniques servant à stimuler la mémoire. Une ceinture wampum ravive la mémoire de la personne qui la regarde et rappelle le sens et la portée des détails tissés dans la ceinture.

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1.1

La ceinture wampum illustrée plus bas est connue sous le nom de ceinture Kaswentha ou ceinture wampum à deux rangs. Cette ceinture est significative, car elle incarne les concepts et les principes de toutes les ententes ou traités de la Nation Haudenosaunee (iroquoise) avec d’autres nations, incluant les colons hollandais, français et anglais. La ceinture wampum à deux rangs est une stipulation et un enregistrement visuel de la souveraineté culturelle, politique et économique des Haudenosaunees inscrite dans leur traité avec le gouvernement hollandais en 1613 et le fondement d’ententes ultérieures avec les Hollandais (1645), les Français (1701) et les Anglais (1763 et 1764). La version écrite du traité de Kaswentha a été traduite du néerlandais par le Dr Van Loon.

La ceinture wampum à deux rangs consiste en deux rangs parallèles de perles mauves sur un fond de perles blanches. La signification de la ceinture wampum à deux rangs est la suivante :

Nous voyagerons ensemble sur la rivière, en parallèle, mais chacun dans notre embarcation. Nous n’imposerons pas à l’autre de lois impératives et nous ne nous immiscerons pas dans les affaires internes de l’autre. Nous ne tenterons pas de diriger l’embarcation de l’autre.

Notre entente sera valide aussi longtemps que le soleil illuminera la terre, aussi longtemps que l’eau coulera dans les rivières, aussi longtemps que l’herbe sera verte à certaines périodes de l’année. Nous avons symbolisé cette entente qui a force obligatoire jusqu’à la nuit des temps, tant que la terre sera en mouvement.

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1.1

Les traités font partie de l’héritage des Premières Nations qui ont conclu, avec d’autres Premières Nations, de nombreuses ententes de partage du territoire pour la chasse et le trappage bien avant l’arrivée des Européens en Amérique du Nord. Le plus connu de ces traités est la Grande Loi de la Paix — Kaianere’kó:wa ou Constitution des cinq nations — qui stipule que les peuples Seneca, Cayuga, Onondaga, Oneida et Mohawk vivront en paix en formant la Confédération iroquoise ou Haudenosaunee. L’entente était fondée sur des idéaux démocratiques qui respectaient l’intégrité et la souveraineté des nations membres. Le 21 octobre 1988, la 331e résolution du Congrès des États‑Unis a reconnu la contribution de la Confédération iroquoise à l’élaboration de la Constitution américaine.

« Il est grand temps que le gouvernement cesse d’essayer de faire des choses pour nous et commence à faire des choses avec nous »

—Chef Atleo

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L’image illustrée ici est le symbole de la Confédération des Cinq‑Nations ou Confédération Haudenosaunee (Iroquois) représentée sur la ceinture...Expand
L’image illustrée ici est le symbole de la Confédération des Cinq‑Nations ou Confédération Haudenosaunee (Iroquois) représentée sur la ceinture wampum Hiawatha.

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1.1

Premiers contacts entre les Européens ​ et les Premières Nations

Depuis des temps immémoriaux, les peuples autochtones vivent et prospèrent partout en Amérique du Nord. Les premiers habitants du Canada s’étaient adaptés aux différents paysages, géographies et climats du continent et avaient créé un ensemble complexe de cultures, de langues, de coutumes, de religions, de soins médicaux et de récits de la création liés à leur forte connexion avec la terre. Les différentes nations autochtones connaissaient très bien la terre qu’elles habitaient, qui subvenait à leurs besoins, et elles la vénéraient et la respectaient en retour. Les premiers habitants faisaient du commerce, se faisaient la guerre, signaient des traités de paix et développaient les compétences, les connaissances et les outils nécessaires pour comprendre leur environnement et se forger des coutumes, une histoire et une culture.

Dès leur arrivée en Amérique du Nord, les premiers Européens ont conclu différentes ententes avec les Premières Nations. Les toutes premières ententes étaient des traités de paix et d’amitié et des accords commerciaux informels entre les pêcheurs anglais, français, portugais, irlandais, espagnols, basques et bretons et les Premières Nations de la côte est (principalement des Mi’kmaq et des Maliseet). Très souvent, les explorateurs et les colons européens, qui ne connaissaient pas les difficiles conditions en Amérique du Nord, ont survécu

Vue des ruines du fort de Chataraqui en juin, 1783Expand
Vue des ruines du fort de Chataraqui en juin, 1783

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1.1

grâce à l’expertise des peuples autochtones. Toutefois, les Européens ont tenté de faire fortune et d’étendre leur influence en Amérique du Nord et ont commencé à établir des colonies et des peuplements, ce qui était encouragé par leur pays natal. Au début du 18e siècle, l’Angleterre et la France étaient les puissances coloniales dominantes.

Pour renforcer leurs intérêts commerciaux (notamment le commerce de la fourrure), les Britanniques et les Français ont conclu différentes ententes et alliances avec les Premières Nations. Par exemple, entre 1725 et 1779, les Britanniques ont conclu de nombreux traités de paix et d’amitié avec les peuples Mi’kmaq, Maliseet et Passamaquoddy dans les territoires qui sont devenus aujourd’hui les provinces du Nouveau‑Brunswick et de la Nouvelle‑Écosse. Les administrateurs coloniaux britanniques s’attendaient à ce que ces traités fassent cesser les hostilités entre les Britanniques et les Premières Nations et mènent à des relations pacifiques à long terme. Ces traités prévoyaient que les Premières Nations pourraient continuer à commercer avec les Britanniques, à chasser et à pêcher et à conserver leurs pratiques traditionnelles et leurs rites religieux. Les Premières Nations n’ont cédé aucune parcelle de terrain dans ces traités.

Les puissances coloniales britanniques et françaises ont étendu leur influence de la côte est vers l’intérieur du territoire Nord‑américain en exploitant et en développant des itinéraires

commerciaux établis depuis longtemps par les Premières Nations. Les années qui ont suivi ont été marquées par des conflits entre les puissances coloniales et entre elles et les Premières Nations, par la construction de forts et de postes par les Européens et par l’établissement de différentes alliances et ententes avec les Premières Nations.

Les conflits militaires entre les Britanniques et les Français (et leurs alliés des Premières Nations) étaient fréquents, et ils ont atteint un point critique en 1760. Les efforts coloniaux des Français se sont terminés lorsque Montréal, la dernière colonie française sur les rives du fleuve Saint‑Laurent, est tombée aux mains des Britanniques. Pour consolider leur pouvoir et garantir des relations pacifiques avec les Premières Nations, les Britanniques ont établi une série de traités entre eux (la « Couronne britannique ») et les collectivités des Premières Nations.

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1.1

Traités subséquents

En 1763, la Proclamation royale a présenté un ensemble important de dispositions. Elle intégrait les territoires français dans la nouvelle province de Québec. La Proclamation royale stipulait aussi que toute négociation future avec les Premières Nations devait avoir lieu entre les Premières Nations et des représentants de la Couronne britannique, et non des individus, et que ces négociations seraient consignées dans des traités écrits. De plus, plusieurs considèrent que la Proclamation royale est le premier instrument légal émis unilatéralement par la

Signatures des Chefs au bas du traité avec les Chippewas, 4 octobre 1842Expand
Signatures des Chefs au bas du traité avec les Chippewas, 4 octobre 1842

Couronne qui reconnait le droit fondamental des Premières Nations à ses terres, ses ressources et sa souveraineté.

Plusieurs traités ont été signés après la Proclamation royale : les traités du Haut-Canada (1764 à 1862) et les traités de l’île de Vancouver (1850 à 1854). La guerre d’indépendance des États-Unis et la création des États‑Unis d’Amérique ont fait en sorte que les autorités britanniques ont cédé des terres à une vague de loyalistes britanniques et à leurs alliés des Premières Nations qui immigraient en provenance du nouveau pays après la guerre. Le besoin croissant de territoire a forcé les Britanniques à exercer une pression encore plus grande sur les Premières Nations.

Préparation du festin servi après la cérémonie de la signature du Traité de la baie James, Osnaburgh HouseExpand
Préparation du festin servi après la cérémonie de la signature du Traité de la baie James, Osnaburgh House

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1.1

guerre. Le besoin croissant de territoire a forcé les Britanniques à exercer une pression encore plus grande sur les Premières Nations.

Autour des années 1830, les Premières Nations ont été confinées dans de minuscules parcelles de leurs territoires originaux qui n’étaient pas viables sur le plan économique. Elles avaient peu de possibilités de croissance et perdaient de plus en plus leur accès à des plantes médicinales et à leur nourriture, ainsi qu’à leurs territoires de chasse et de pêche. À compter de 1871, le gouvernement canadien a conclu des traités avec les Premières Nations afin de développer l’agriculture et exploiter les ressources à l’ouest et au nord du pays. Ces traités, maintenant connus sous la désignation de « Traités numérotés », concernent le nord de l’Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, l’Alberta et des parties du Yukon, des Territoires du Nord‑Ouest et de la Colombie‑Britannique.

 

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1.1

Femmes et enfants (de la Première Nation Brunswick House) au festin de la cérémonie de versement des paiements prévus par le Traité no 9 (au poste deExpand
Femmes et enfants (de la Première Nation Brunswick House) au festin de la cérémonie de versement des paiements prévus par le Traité no 9 (au poste de la Compagnie de la Baie d'Hudson) Brunswick House en Ontario.

Les Traités numérotés (1 à 11) 1871 à 1921

Conformément aux dispositions de la Proclamation royale de 1763, la Couronne britannique, par l’intermédiaire de ses représentants du Dominion du Canada, devait conclure des traités officiels avant de continuer son expansion vers l’ouest. La Couronne britannique et les Premières Nations ont interprété le sens et l’intention des traités de façons radicalement différentes.

 

La Couronne britannique considérait qu’en signant les Traités numérotés, les Premières Nations abandonnaient leurs droits et leur titre au territoire, permettant à des colons venant de l’étranger d’occuper les terres des colonies revendiquées par les Britanniques. En échange, la Couronne britannique accordait en perpétuité aux Premières Nations certains droits inhérents et issus de traités.

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1.1

Carte illustrant les traités conclus avec les Premières Nations en Ontario, Dominion du Canada.Expand
Carte illustrant les traités conclus avec les Premières Nations en Ontario, Dominion du Canada.

Les Premières Nations qui ont signé ces Traités numérotés croyaient qu’elles établissaient une relation de confiance avec la Couronne britannique; qu’elles allaient partager le territoire et coexister avec les colons arrivant de l’étranger. Par conséquent, les Premières Nations n’ont jamais accepté de vendre leurs terres et leurs ressources. Elles ont plutôt accepté de partager leurs terres ancestrales, jusqu’à la profondeur d’un sillon de charrue, comme l’indique la citation qui suit :

Reconstitution du Traité no 5 à Cross Lake au Manitoba. Reconstitution de l’histoire orale du traité conclu entre la Couronne britannique et les ChefsExpand
Reconstitution du Traité no 5 à Cross Lake au Manitoba. Reconstitution de l’histoire orale du traité conclu entre la Couronne britannique et les Chefs du territoire du Traité no 5 en 1875.

« À l’époque, le gouvernement nous disait que nous allions coexister, qu’il n’allait pas nous subtiliser ce que nous avions… Je suis ici pour emprunter la terre… jusqu’à la profondeur d’un sillon de charrue… c’est l’étendue de ce que je veux. »

—Sénateur Allan Bird, Nation crie de Montreal Lake, traité 6

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1.1

En se fondant sur l’histoire orale des Premières Nations et la documentation écrite, incluant le texte des Traités numérotés, les Premières Nations affirment que la Couronne britannique a fait les promesses ci‑dessous au moment de la négociation et de la signature des traités numérotés. Ces promesses sont communément appelées les droits inhérents et issus de traités des Premières Nations :

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1.1

Traités 1 à 11 ​ (territoire traditionnel — contexte actuel)

Voir les régions visées par les traités 1 à 11 ;

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1.1

Indiens Siwash de la Colombie‑Britannique. Lilloett, [Lillooett] C.-B., territoire toujours non cédéExpand
Indiens Siwash de la Colombie‑Britannique. Lilloett, [Lillooett] C.-B., territoire toujours non cédé

Territoires non cédés

Le plus récent des traités historiques a été conclu en 1923. La politique gouvernementale n’a cessé de progresser vers l’émancipation et l’élaboration de lois qui faisaient obstacle à la souveraineté des Premières Nations, notamment en criminalisant l’embauche d’un avocat par une Première Nation pour soumettre des revendications territoriales. Par conséquent,

le gouvernement canadien n’a jamais conclu de traité avec des Premières Nations de certaines régions du Canada, incluant la majorité du territoire de la Colombie‑Britannique. Les Premières Nations n’ayant pas signé de traité défendent leurs droits à leurs terres puisqu’elles n’ont pas été cédées au gouvernement.

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1.1

Traités modernes au Canada — ​ 1975 à ce jour

Les traités modernes sont aussi connus sous le nom d’ententes sur les revendications territoriales globales. Un rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones stipule que « Les traités sont des ententes solennelles qui stipulent des promesses, des obligations réciproques et des avantages tant pour les peuples autochtones que pour la Couronne du chef du Canada ».

 

La page de signature de l’Accord définitif Nisga’a.Expand
La page de signature de l’Accord définitif Nisga’a.

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1.1

Liste partielle des traités modernes et des ententes sur les revendications territoriales ​ globales au Canada.

Sélectionnez une date pour obtenir plus d’information :

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1.1

Ententes sur l’éducation :

2006 – Loi sur la compétence des Premières Nations en matière d’éducation en Colombie‑Britannique

1998 – Loi sur l’éducation des Mi’kmaq

1997 – Accord définitif sur l’éducation de la Nation Anishinabek (Union des Indiens de l’Ontario)

Pour une liste plus détaillée des accords en cours de négociation, veuillez consulter le site Web des Affaires autochtones et du Nord Canada.

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Consulter la Loi sur l’éducation des Mi’kmaq Page 9

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1.1

Interprétations et points de vue

L’histoire, l’interprétation et la mise en œuvre des traités ont toujours été, et sont toujours, empreintes de conflits et de controverses.

Des critiques ont offert des arguments convaincants voulant que tous les traités peuvent présenter des lacunes et être sujets à réexamen. La citation qui suit illustre bien les complexités de l’interprétation des traités et de la résolution des différends :

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Section 2

La législation

Plusieurs affaires judiciaires ont mené à des décisions historiques dans des dossiers sur les droits et titres ancestraux. 

« Le vote… a ouvert la voie à de nouveaux droits et à de nouvelles responsabilités. Les autochtones ont maintenant une voix juridique dans les affaires de la province et ils ont le droit de réclamer d’être des citoyens égaux à tous les autres. Aujourd’hui, les autochtones sont considérés comme des citoyens de deuxième ordre, privés de leurs droits ancestraux… ma vision d’une Grande Charte complète pour les autochtones se traduit par l’égalité des chances en matière d’éducation, de santé, d’emploi et de citoyenneté. »

—Frank Calder

Régler les revendications territoriales des Nisga’a est une tâche qui a été prise à cœur par le peuple Nisga’a. De gauche à droite : Dr Frank...Expand
Régler les revendications territoriales des Nisga’a est une tâche qui a été prise à cœur par le peuple Nisga’a. De gauche à droite : Dr Frank Calder, Hubert Doolan, sénateur Guy Williams, Eli Gosnell, inconnu, William McKay et James Gosnell.

 

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1.1

Dans le cas de l’affaire Calder de 1967, Frank Calder et plusieurs aînés Nisga’a ont intenté une poursuite contre la province de la Colombie‑Britannique invoquant que leurs titres fonciers avaient été abrogés illégalement. Le jugement rendu n’a pas été à la faveur des Nisga’a, mais la décision est néanmoins considérée comme historique pour les droits territoriaux des autochtones parce que la Cour Suprême du Canada a cité la Proclamation royale de1763 dans sa décision. Émise par le roi George III d’Angleterre, elle décrétait que les titres fonciers des autochtones existaient en Amérique du Nord et qu’ils subsisteraient tant qu’ils ne seraient pas annulés par traité. De plus, elle interdisait aux colons d’acquérir des terres des autochtones, par l’achat ou par la force.

Le 26 juin 2014, la Cour Suprême du Canada a statué que la Première Nation Tsilquot’in, occupant la région centrale de la Colombie‑Britannique, détenait un titre ancestral sur environ 1 800 kilomètres carrés de terres ancestrales — et que les permis d’exploitation forestière émis aux sociétés forestières au début des années 1980 avaient violé le droit des Tsilquot’in de décider de l’utilisation de leurs terres. L’affaire fut un triomphe pour les droits des autochtones. 

Cinq grands défis se posent dans l’interprétation des traités, principalement parce que les Européens et les autochtones ont deux visions du monde très différentes. 

Le premier défi concerne le sens et le symbolisme du mot « terre ». Il existe une profonde différence entre « partager des terres » (le point de vue des Premières Nations) et « posséder des terres » (le point de vue des Européens).

Le sens du mot « terre » pour les Premières Nations est bien exprimé par cette citation du document Canada in the Making :

Le concept de possession des terres était complètement étranger aux peuples autochtones. Du point de vue de la culture et de la spiritualité des autochtones, il n’est pas possible d’acheter ou de vendre des terres. Les autochtones se considéraient les gardiens spirituels de la terre et non ses propriétaires. La terre était considérée comme un présent du créateur ou Grand Esprit, et les ressources qu’elle fournissait devaient être utilisées uniquement à des fins de survie. Ainsi, le concept de « cession des terres » causait énormément de confusion chez les collectivités autochtones.

Comme l’indique le document http://firstpeoplesofcanada.com/fp_treaties/fp_treaties_two_views.html :

Les Premières Nations croyaient qu’elles permettaient aux nouveaux arrivants d’utiliser une partie de leurs terres à des fins d’agriculture. Les Premières Nations n’avaient certainement pas l’intention de céder leurs titres fonciers. Elles ne pouvaient pas non plus comprendre le concept d’extinction à tout jamais de leurs droits et du titre sur leurs terres.

Le deuxième défi a trait à la forme ou au processus des traités. Les Européens utilisaient des textes écrits pour officialiser les accords alors que les Premières Nations utilisaient plutôt la communication verbale. Lorsqu’elles signaient des traités avec les Européens, les Premières Nations utilisaient un médium qui leur était étranger — le document écrit — ce qui laisse entendre que les Premières Nations pouvaient ne pas comprendre toutes les implications de l’entente. Comme l’explique le document « Treaties & Cultural Change »: 

Les Premières Nations ont une tradition orale. L’information importante était relayée verbalement au cours de cérémonies importantes et dans le cadre de célébrations. La transmission orale était importante pour elles, pas les mots sur papier.

À l’arrivée des Européens, les Premières Nations n’avaient pas encore développé de tradition écrite, mais certaines Premières Nations avaient créé la ceinture wampum — une représentation visuelle d’un événement ou d’un accord qui pouvait aussi remplir des fonctions cérémoniales. 

Le troisième défi concerne la relation entre les signataires. Les Premières Nations se considéraient comme des peuples souverains et distincts forgeant des relations avec d’autres peuples souverains et distincts, les Européens. Du point de vue des Premières Nations, le respect des traditions, des cultures, des religions et des coutumes de chacun des signataires des traités était convenu. Toutefois, il est clair que les Européens considéraient les traités comme le début de l’assimilation des Premières Nations à la vision du monde et aux coutumes des Européens, une position qui aurait de graves conséquences sur la santé, la stabilité et l’intégrité futures des peuples et des collectivités des Premières Nations.

Le quatrième défi concerne la portée des traités, c’est‑à‑dire la différence entre une interprétation littérale des traités et le respect de leur esprit et leur intention. Les Européens adoptaient une lecture très littérale des traités, c’est‑à‑dire que les obligations et les responsabilités de chacune des parties étaient limitées aux conditions stipulées dans les traités. Les Premières Nations, d’autre part, avaient une compréhension plus large des conditions stipulées dans les traités. Pour elles, les traités n’étaient qu’un point de départ. Les Premières Nations considéraient que les obligations, les responsabilités et les déclarations verbales faites par les négociateurs européens faisaient partie intégrante des traités — l’honneur et l’honnêteté étaient estimés. Les traités étaient considérés comme des ententes dynamiques et évolutives qui s’adaptaient aux circonstances changeantes de chacun des signataires de l’accord.

Le cinquième défi concerne la langue. Les traducteurs professionnels et expérimentés savent pertinemment que de graves erreurs peuvent se produire lorsqu’une idée, un énoncé ou même un mot est traduit d’une langue à une autre. Par exemple, un mot d’une langue peut ne pas avoir d’équivalent exact dans la langue cible, ou peut avoir plusieurs traductions possibles. En raison de la nature et de la complexité des langues, il est rare qu’une traduction soit absolument parfaite, une transcription exacte dans une autre langue. Ces erreurs potentielles peuvent être amplifiées lorsque la traduction est faite par des personnes qui ne connaissent pas les subtilités des langues et qui ne sont pas conscientes de l’influence du contexte sur les mots, les phrases ou les concepts traduits. Le champ miné de la traduction est encore plus périlleux lorsque le document est rédigé par une seule des parties, dans sa langue, et qu’il doit être compris et accepté par une personne parlant une autre langue.

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1.1

Après la création du Dominion du Canada en 1867, les Premières Nations ont continué à conclure des traités, sauf que le gouvernement du Canada a remplacé les nations européennes. Ce numéro de Plain Talk ne peut présenter qu’un aperçu des traités et se concentre sur leur nature, leur histoire et les problèmes qui y sont associés. Ceux et celles qui veulent en savoir plus à ce sujet peuvent consulter les nombreux documents disponibles sous forme imprimée dans différentes archives ainsi que sur Internet.

Le Manitoba et la Saskatchewan ont élaboré d’excellents documents entièrement consacrés au sujet essentiel que sont les traités : 

L’initiative de trousse d’outils d’éducation à l’égard des traités du Manitoba (Manitoba Treaty Education Initiative Tool Kit) élaborée par la Commission des relations découlant des traités du Manitoba (CRTM) et la trousse d’outils à l’égard des traités pour les jeunes de la maternelle à la 12e année de la Saskatchewan (Saskatchewan Treaty Kit K-12), élaborée par le Bureau du commissaire aux traités. Il est recommandé de consulter ces deux ressources afin d’obtenir une compréhension étendue des traités et des relations qu’elles établissent.

Le théâtre est souvent un excellent endroit pour explorer des questions délicates et controversées. Ian Ross, un dramaturge lauréat du prix du gouverneur général, a écrit une pièce à la fois drôle et instructive au sujet des traités. Intitulée Kinikinik, la

pièce explore les divers aspects des traités. Dans la pièce, une branche de saule fait figure de symbole pour la terre. Deux personnages, un loup et un castor, rivalisent pour posséder la branche de saule. Un troisième personnage, une tortue, amène le loup et le castor à découvrir que régler la question de la propriété de la branche de saule n’est pas chose simple. Les personnages découvrent qu’une entente verbale pourrait être insuffisante. Ils découvrent aussi qu’un accord écrit, comme un traité, peut être injuste si le document est rédigé par une seule des parties, dans une langue que l’autre partie risque de ne pas comprendre parfaitement. Qu’elle soit lue à voix haute par un

 

Kinikinik, une pièce sur les traités par Ian Ross (Le scénario de Kinikinik se trouve dans la trousse d'outils.)Expand
Kinikinik, une pièce sur les traités par Ian Ross (Le scénario de Kinikinik se trouve dans la trousse d'outils.)

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1.1

Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (Déclaration de l’ONU). Expand
Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (Déclaration de l’ONU).

groupe ou jouée par une troupe de théâtre amateur ou professionnelle, la pièce Kinikinik est une puissante exploration de la complexité de la création, de la mise en œuvre et de l’interprétation des traités. 

Les traités, en tant qu’accords entre des entités souveraines comme des nations, établissent invariablement une relation entre les nations. La phrase « Nous sommes tous peuples des Traités » est tirée des documents produits par la Commission des relations découlant des traités du Manitoba. « Nous sommes tous peuples des Traités » est un bref énoncé qui signifie que les Premières Nations et les Canadiens sont des partenaires à part entière de chaque traité et que nous sommes tous responsables de veiller à la mise en œuvre et au respect des traités. Il est regrettable que les gouvernements canadiens aient constamment manqué à leurs obligations envers les Premières Nations en ne respectant pas les engagements pris dans les traités. S’il reconnaissait ses obligations et mettait en œuvre les traités, le gouvernement du Canada pourrait contribuer considérablement au règlement des iniquités dont font l’objet les Premières Nations. C’est d’autant plus déplorable étant donné que le Canada a donné son appui à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (Déclaration de l’ONU) en 2010 et 

Les traités, en tant qu’accords entre des entités souveraines comme des nations, établissent invariablement une relation entre les nations. La phrase « Nous sommes tous peuples des Traités » est tirée des documents produits par la Commission des relations découlant des traités du Manitoba. « Nous sommes tous peuples des Traités » est un bref énoncé qui signifie que les Premières Nations et les Canadiens sont des partenaires à part entière de chaque traité et que nous sommes tous responsables de veiller à la mise en œuvre et au respect des traités. Il est regrettable que les gouvernements canadiens aient constamment manqué à leurs obligations envers les Premières Nations en ne respectant pas les engagements pris dans les traités. S’il reconnaissait ses obligations et mettait en œuvre les traités, le gouvernement du Canada pourrait contribuer considérablement au règlement des iniquités dont font l’objet les Premières Nations. C’est d’autant plus déplorable étant donné que le Canada a donné son appui à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (Déclaration de l’ONU) en 2010 et en 2016. (Vous trouverez plus d’information sur la Déclaration de l’ONU dans la trousse d’outils.)

 

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1.1

Dans une lettre adressée au premier ministre du Canada, le Chef du Grand conseil de la Nation Anishinabek Patrick Madahbee a exprimé sa consternation face aux efforts continus du gouvernement fédéral de restreindre les droits inhérents et issus de traités des Premières Nations.

Lisez la lettre du Chef du grand conseil Patrick Madahbee à l’attention du premier ministre du Canada :

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Chef du Grand conseil de la Nation Anishinabek Patrick MadahbeeExpand
Chef du Grand conseil de la Nation Anishinabek Patrick Madahbee

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Section 2

Observations du Chef Atleo

L’ancien Chef national de l’Assemblée des Premières Nations, le Chef Shawn Atleo, présente quelques observations au sujet des traités et des droits issus de traités.

« Je vous invite tous et toutes à vous joindre à nous, les Premières Nations, dans ce nouveau rêve national de forger un Canada plus fort et plus juste. Nous pouvons créer un avenir meilleur, comme nos ancêtres l’ont fait, en partageant une vision d’une nation fondée sur le respect mutuel, le partenariat et le partage. »

— Chef Atleo

Cérémonie traditionnelle de purification par la fumée à une rencontre entre la Couronne et les Premières Nations avec l’aînée Bertha Commanda...Expand
Cérémonie traditionnelle de purification par la fumée à une rencontre entre la Couronne et les Premières Nations avec l’aînée Bertha Commanda (décédée), le premier ministre Harper, le Chef national Shawn Atleo et le gouverneur général David Johnson.

 

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1.1

(Pour voir l’intégralité des observations du Chef Atleo, consultez la trousse d’outils dans l’appli iTunes U.)

La reconnaissance et la mise en œuvre des droits ancestraux et issus de traités nous ramène à la fondation même de ce pays — un pays fondé sur nos terres et construit politiquement par l’entremise d’accords pacifiques basés sur le respect, la reconnaissance, le partage et le partenariat.

Depuis 1982, les gouvernements successifs se sont montrés peu enclins à déployer les efforts requis pour arriver à une véritable réconciliation. Nous avons entendu de belles paroles, mais l’équation correspondant aux initiatives sans fondement est bien connue : paroles moins action égale zéro.

Mais les Premières Nations ne restent pas debout à ne rien faire — nous n’attendons plus. Nous agissons. Depuis des décennies, nous proposons des plans positifs pour faire avancer les choses; des plans qui visent à redonner vie aux promesses faites l’un à l’autre; des plans pour assurer un meilleur avenir à nos enfants.

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Plain Talk 4 | Traités

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Chief Atleo concernant la voie à suivre et le défi qui se dresse devant nous :

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Plain Talk 4 | Traités

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Nous devons adopter des approches qui permettent de mettre en œuvre les droits inhérents et issus de traités des Premières Nations. De traité en traité, de nation à nation, nous devons tracer une nouvelle voie — une voie caractérisée par l’engagement, par l’énergie et la détermination d’arriver à une résolution. Cette nouvelle voie donnerait vie à une relation durable fondée sur le respect mutuel et la prospérité.

Le Canada n’a toujours pas d’approche ou de politique de mise en œuvre ou de surveillance des relations avec les Premières Nations découlant des traités, bien que les traités soient les documents fondateurs de ce pays. Il faut absolument remédier à cette situation afin de permettre la mise en œuvre de l’esprit et de l’intention des traités.

Par « esprit et intention », je fais référence à la compréhension qu’ont les Premières Nations des traités. Cette perspective doit être reconnue et respectée.

Le moment est venu d’apporter un changement. Pour nous, le temps est venu. Les Premières Nations tentent par tous les moyens de coopérer. Nous sommes convaincus que nous pouvons travailler ensemble pour honorer nos promesses au bénéfice de tous et de toutes.

Les Premières Nations veulent être des partenaires à part entière dans la détermination d’un avenir collectif — pour nos collectivités et pour le pays dans son ensemble.

Je vous invite tous et toutes à vous joindre à nous, les Premières Nations, dans ce nouveau rêve national de forger un Canada plus fort et plus juste. Nous pouvons créer un avenir meilleur, comme nos ancêtres l’ont fait, en partageant une vision d’une nation fondée sur le respect mutuel, le partenariat et le partage.

L’article 35 et d’autres stipulations ont tracé notre voie, ce qui est un avantage de taille — la route qui est devant nous est longue et difficile — mais c’est un chemin que nous devons suivre ensemble. Lorsqu’on repense à l’histoire de l’homme et de l’ours, on se rend compte que la morale est celle du succès dans les relations. C’est l’histoire d’une réconciliation qui apporte d’énormes avantages pour tous sur le plan de l’économie et de la durabilité. La sagesse qui transparaît de ce récit est un exemple à suivre pour nous aujourd’hui.

Je terminerai en citant le juge en chef Antonio Lamer : « Il faut se rendre à l’évidence, nous sommes tous ici pour y rester ». J’ajouterais à ces sages paroles que la situation nous concerne tous et que tous ensemble, nous pouvons réussir.

 

Kleco, Kleco!

Chef national Shawn Atleo

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